Curitiba
Capitale Ecologique du Brasil
Sources:
- émission Dunia (1996) de la Télévision Belge, réalisation de Philippe Gauthier et Manu Simon.
- "Curitiba em dados" IPPUC 1996.
- article de Véronique Kiesel (Le Soir 21-09-95)
- Ecology week in Dordrecht (oct. 93)
- photos: page Internet de la Prefeitura da cidade Curitiba
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Une ville brésilienne comme les
autres?
Curitiba, capitale de l'Etat du Parana, est localisée au centre de la région plus industrialisée d'Amérique du Sud.
Celui qui voit des photos de Curitiba se demande comment cette
ville fut gratifiée d'un prix environnemental de l'ONU en 1990 puis
du titre de Capitale Ecologique du Brasil à la conférence mondiale ECO 1992.
En effet, extérieurement, rien ne distingue Curitiba d'une autre métropole sud-américaine:
- les gratte-ciel déchiquetent la ligne de l'horizon.
- des favelas et des blocs d'appartement s'opposent à des quartiers résidentiels.
- de 150 000 habitants en 1950, Curitiba est passée à 1 400 000 habitants en 1996. Pendant trois décennies consécutives, Curitiba a connu le taux d'accroissement de population le plus élevé du Brasil.
- en 1995, on comptait 540 000 véhicules immatriculés à Curitiba.
Au spectateur plus attentif se révèle une autre ville:
une ville où le transport public est performant et bon marché, où
les déchets sont recyclés aux deux tiers, où les enfants des rues
sont pris en charge, où l'administration et la médecine gratuite
sont décentralisés dans des bâtiments gérés par des associations de
quartier,...
C'est dans ce domaine que Curitiba montre sa première réalisation
exemplaire.
Des tramways ont circulé jusqu'en 1952. A partir de cette date, le service de transports publics s'est fortement dégradé au profit de la voiture individuelle.
En 1974, la municipalité prend la première inititiative pour relever le transport en commun: la Rede Integrada de Transporte. Les premières voies pour autobus en site propre sont crées.
En 1991, à l'heure où toutes les villes de plus d'un million d'habitants
choisirent un métro très coûteux et destructeur (Bruxelles en est
un exemple remarquable), Curitiba opta pour un système de bus 200
fois moins cher que la solution métro, mais où tous les avantages
du métro sont repris:
- sites propres sur les artères principales.
- temps d'attente limité à 2 minutes.
- bus extra-longs bi-articulés (270 passagers) pilotés par un seul employé.
- facilités pour les moins-valides.
- réseau en étoile interconnecté avec des routes
circulaires.
La municipalité a tracé les parcours, choisi les véhicules, décidé
des tarifs (le ticket coûte 15 FB quelque soit la distance tout en
permettant le transit) et installé les stations (des arrêts
existent aussi dans les favelas).
Mais ce sont des sociétés privées qui ont acheté les bus et engagé
les chauffeurs. L'investissement public a été de 300 millions de $,
mais maintenant le système fonctionne sans subsides car, pour un $
public investi, il y a 4 $ privés.
Résultat:
1,8 millions de passagers transportés par jour (80 % des
déplacements sont effectués en bus malgré que 28 % des usagers des
bus possèdent leur propre voiture), 30 % de pollution aérienne en
moins. Cela sans investissements publics ni subventions.
Parallèlement au transport public, Curitiba a réalisé de nombreuses
zones piétonnes en centre-ville, dont le boulevard central. On
compte aussi 135 km de pistes cyclables.
Les rues de Curitiba sont aussi propres que celles d'une ville
suisse.
Le secret: la collecte contre cadeau.
En 1989, sont lancés les programmes "Lixo que não é Lixo" (les déchets ne sont pas des déchets) et "Cambio verde" (échange vert). La municipalité récompense toute personne qui lui apporte des
ordures où la fraction organique a été séparée du reste des
déchets. Deux fois par semaine, des camions sillonnent la ville et
réceptionnent les paquets de papier, de verre ou de plastique
préparés par les habitants.
En échange de 4 kg d'ordures triées, on peut recevoir un kg de
légumes frais ou encore un ticket de bus ou d'opéra. Les enfants
reçoivent du matériel scolaire, des friandises à Pâques et des jeux
à Noël.
Les déchets organiques sont compostés pour les plantations de la
ville. Les autres déchets sont alors triés dans 16 centres de tri
et seulement ce qui n'est pas recyclable sera alors enfoui.
Le recyclage et la lutte contre le gaspillage transparaît dans
toute la politique curitibaine:
- Les anciens bus sont affectés à des programmes éducatifs et
culturels comme salles de classe ou bibliothèques.
- L'opéra de Arame (1992, 2400 places) et l'Universidade Livre do Meio Ambiente (1991) ont été construits dans d'anciennes carrières.
- Des pavillons de cette Université de l'Environnement ont été
construits avec d'anciens poteaux de téléphone comme structure. Ce qui fait dire, à Jaime Lerner, que l'on pratique l'architecture poste-modernisme à Curitiba (poste = poteau en brésilien).
- Les phares du savoir (1995)
Il s'agit de 42 petites tours bien reconnaissables dans le paysage
des quartiers défavorisés. Ouvertes jusqu'à 21 h. en semaine, elles contiennent une bibliothèque et
des salles de réunions où les enfants sont pris en charge.
Il
devrait y en avoir 50 fin 1996. En 1995, également, un "Farol das Cidades", bibliothèque multimedia, a été inuguré.
- Les "Pia" (Programa de Integração da Infância e da Adolescência)
Les "Pia" offrent aux enfants et adolescents de familles modestes des activités sportives, culturelles, des loisirs et des initiations professionnelles.
Les "Pia ambiental", créés en 1990, sont des programmes d'éducation écologique, au nombre de 34,
pour les enfants et les adolescents, de 4 à 14 ans, afin de leur éviter la rue.
Ils entretiennent des jardins biologiques, font du papier recyclé, des nichoirs,...
Aux adolescents de 14 à 17 ans, sont proposées des formations professionnelles dans le domaine du jardinage et d'horticulture.
Il existe aussi 64 Pia artistique.
- Les rues de la citoyenneté (1995)
Au nombre de sept, elles regroupent des services administratifs et sociaux
décentralisés, des commerces et des salles polyvalentes pour activités culturelles et sportives.
On y trouve aussi les magasins familiaux où les familles aux
revenus modestes peuvent acheter les denrées de première nécessité
au prix coûtant.
Ces "rues" sont entièrement gérées par les associations de
quartier.
- Les centres de santé 24h.
Ils sont également gérés par les associations de quartiers. On peut
y consulter gratuitement 2 généralistes, 2 pédiatres, 1 gynécologue
et 1 dentiste. Ils sont ouverts 24 h sur 24 et les patients peuvent y être reçus pour de courtes hospitalisations (inférieures à 24 h.).
On compte 85 centres en 1995.
- Le système éducatif
La Ville de Curitiba tient 235 crèches et 120 écoles. Les enfants y
apprennent à lire, à écrire et à calculer dans des livres
spécialement pensé pour Curitiba et sa politique environnementale
et sociale.
- Les parcs
En 1995, chaque Curitibain dispose en moyenne de 50 m2 alors que 20
ans plus tôt, 1/2 m2 était la norme. 21 parcs ont été créés depuis 1980.
Derrière le "miracle" de Curitiba, il y a le travail acharné d'un
maire et de son équipe.
Jaime Lerner, architecte et urbaniste, a été nommé maire de
Curitiba en 1971 par le gouvernement militaire de l'époque! Depuis,
il a été élu au même poste deux fois. Il aura gouverné Curitiba
pendant 12 ans.
C'est la créativité de Lerner qui a fait de Curitiba ce qu'elle est
aujourd'hui. Par la créativité, il solutionnait les problèmes que
le manque d'argent ne permettait pas de résoudre.
En 1993, Jaime Lerner a été nommé gouverneur de l'Etat de Parana,
élu sur la liste du Parti des Travailleurs (du célèbre syndicaliste
Lula). A Curitiba, il a cédé la place à Liana Vallicelli, également
architecte, qui continue le travail entrepris.
Va-t'-on voir la créativité curitibaine s'étendre à tout l'Etat de
Parana?
En tout cas, il existe déjà 77 vila rural, où on propose aux
urbains de se réapproprier la campagne avec un petit terrain
autosuffisant. Jaime Lerner essaye au niveau de l'Etat de freiner
l'exode rural et la croissance des villes en créant des villes à la
campagne.
© Paul De Neyer mai 1997.
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