Malgré de nombreux atouts comme
des potentialités économiques réelles, un peuple uni qui ne connaît
ni les dérives nationalistes ni les rivalités ethniques et une
certaine réserve vis-à-vis du libéralisme économique, la situation
financière est très difficile.
Pour fonctionner et pour
préserver sa biodiversité, la réserve doit devenir autonome et
trouver d'autres sources de financement à l'extérieur du pays. Les
dirigeants de la réserve se sont résolument tournés vers
l'écotourisme, conscients des limites de cette démarche et des
précautions à prendre. Avec leurs partenaires occidentaux, ils vont
tenter d'en faire un véritable exemple de développement durable.
Elle se situe à environ 120 km au nord de Minsk, la capitale de la Biélorussie. Cette réserve, bordée à l'ouest sur plus de 100 km par la Bérézina dont elle tire son nom, est traversée par de nombreux affluents.
Ce territoire d'origine glaciaire de 120 000 ha constitue une vaste mosaïque de forêts, de lacs, de marais et de tourbières. Certains milieux naturels sont vierges, les forêts marécageuses et les tourbières par exemple, d'autres ont été soustraits à l'activité humaine depuis 1925.
Quelques zones agricoles, composées de prairies et de cultures très extensives, sont gérées en kolkhoze et sont situées dans une partie de la réserve où vivent les 1 500 habitants permanents.
Les forêts couvrent 84 % de la réserve.
Les parties
septentrionale et centrale sont couvertes de vastes forêts
composées de pins sylvestres uniquement ou comprenant aussi de
l'épicéa. Ces pinèdes se trouvent dans la zone biogéographique de
la taïga méridionale. Le bouleau dans les tourbières ou les zones
de recolonisation, le chêne rouvre et l'épicéa sur les sols plus
riches et l'aulne dans les zones humides constituent les autres
essences principales de ces forêts naturelles, auxquelles
s'ajoutent trembles, sorbiers et saules.
Les tourbières acides à
sphaignes, dont la plus grande couvre 11 000 ha, donnent une idée
de la dimension unique de cette nature par rapport aux espaces
protégés d'Europe de l'Ouest.
Roselières, marécages, rivières et lacs occupent la partie méridionale de la réserve et forment sa zone centrale interdite à la pénétration humaine. De nombreux lacs parsèment la réserve. Les plus grands sont Plavno (332 ha) et Palik (712 ha). Certaines îles et marais n'ont d'ailleurs jamais été explorés par les scientifiques.
La flore (plus de 7 80 espèces recensées dans la réserve) présente principalement un caractère boréo-continental, comme en témoignent les pinèdes à myrtille des marais, les tourbières à sphaignes avec drosera, canneberge, linaigrette et andromède et les forêts marecageuses à calla des marais et fougères des marais et à crête.
Les mammifères de Bérézinsky contribuent au caractère - mythique de ces immensités sauvages : loup, ours, lynx, loutre, élan, bison, chien viverrin, vison et castor.
Difficile d'imaginer dans les pays d'Europe Occidentale une telle richesse en plaine à une centaine de kilomètres d'une ville de 2 millions d'habitants.
Le loup est pourchassé sur l'ensemble du territoire national, sauf dans la zone centrale de la réserve (30 à 40 loups ont été tués chaque année à l'extérieur de la réserve jusqu'en 1993) alors que l'ours est protégé.
Les castors sont les animaux mascottes de Bérézinsky, puisque c'est pour les protéger que la réserve fut créée. La réussite est totale, car la réserve en abrite près de 600.
Les bisons ont été réintroduits en 1974. Leur nombre est actuellement passé de 5 à 10.
Bérézinski est le paradis des oiseaux avec 270 espèces dont 167 nicheuses, parmi lesquelles : la cigogne noire, le balbuzard, le grand tétras et le tétras lyre, le circaète Jean-le-blanc, l'aigle pomarin, la chouette de l'Oural, le pic tridactyle et à dos blanc et le roselin cramoisi.
Bérézinsky est
également une terre d'histoire avec des tombes slaves du VlIIe
siècle, traces de la première occupation . On peut observer les
restes d'un canal construit il y a 200 ans pour relier les bassins
de la Baltique et de la mer Noire.
Un monument érigé au bord de
la Bérézina rappelle la sanglante débâcle des troupes de Napoléon
en 1812.
Enfin la réserve de Bérézinsky est parsemée de
monuments à la gloire des partisans qui se sont réfugiés dans ces
forêts impénétrables pour résister à l'armée d'occupation allemande
pendant la Seconde Guerre mondiale.
Beaucoup de forêts ont été
détruites à cette époque, ce qui explique leur jeunesse
actuellement.
Cette réserve constitue véritablement une référence
pour tous les gestionnaires des milieux naturels et les
spécialistes de la protection de la nature, car elle a gardé
intacte la faune qui peuplait la plupart des forêts d'Europe avant
les grands défrichements.
C'est pour cette raison que ce
territoire est devenu réserve de la biosphère en 1979 (label
décerné par l'UNESCO dans le cadre du programme international
L'Homme et la biosphère) et a reçu le diplôme européen du Conseil
de l'Europe en 1995.
Ce contexte défavorable a une influence sur la
réserve de Bérézinsky. Celle-ci, comme tous les espaces protégés de
Biélorussie, dépend directement du Conseil des ministres. Le
personnel (près de 200 personnes) reçoit de modestes salaires et
souvent avec du retard. Les besoins alimentaires de la population
rurale sont couverts grâce aux cueillettes en forêt et au
braconnage (pêche et chasse) jusque dans la réserve. La direction
de Bérézinsky gère une réserve de chasse de 8 000 ha qui jouxte la
réserve de la biosphère. Elle y accueille des chasseurs allemands
et français pour une chasse aux trophées (élan, sanglier et grand
tétras).
Celle-ci risque de déséquilibrer les populations
concernées (seuls les mâles sont recherchés) et entraîne une chasse
au loup excessive, même dans la réservée naturelle, pour maintenir
les populations d'ongulés au niveau le plus élevé; pourtant, rien
ne démontre qu'il existe une quelconque corrélation entre les
fluctuations de ces populations d'ongulés et celles du loup.
Enfin, le gouvernement demande à la réserve d'envisager une
exploitation agricole et forestière de certaines zones.
Les
gestionnaires de la réserve souhaitent donner priorité au tourisme
nature plutôt qu'au tourisme de chasse.
Conformément à la
stratégie mondiale pour les réserves de la biosphère définie en
mars 1995 à Séville (Espagne), la réserve de Bérézinsky doit se
doter d'un plan de gestion. Ce dernier doit prévoir l'utilisation
durable des ressources naturelles, la programmation des recherches
scientifiques, un programme d'accueil des visiteurs et des études
d'impact et de faisabilité des activités économiques comme le
tourisme. Dans ces domaines, la communauté internationale se doit
de poursuivre ses efforts d'accompagnement et d'assistance
technique
Jean-Claude Génot
Chargé de
la protection de la nature au Parc naturel régional des Vosges du
Nord, responsable de la coopération scientifique avec la réserve de
Bérézinsky.
Parc naturel des Vosges du Nord
BP 24
F-67290
La Petite Pierre
Mikhail Criventchuk
Directeur de la réserve
de Bérézinsky (Bélarus)
Berezinsky Biosphere reserve
Lepel
District, Vitebtsk Region
211 188 Domzheritsy, Belarus